La Ruche Qui Dit Oui!

La Ruche Qui Dit Oui! est là pour réparer une injustice : la très faible rémunération des producteurs agricoles ou artisans du fait de la multitude d’intermédiaires entre les producteurs et les consommateurs. L’entreprise cherche aussi à faire passer un message : « manger mieux , manger juste ». Elle prétend offrir une totale transparence aux utilisateurs, qui grâce à elle connaissent les produits et leur provenance. Penchons-nous sur le cas atypique de cette « Entreprise Sociale et Solidaire » récemment labellisée.

Un concept qui séduit

La Ruche Qui Dit Oui!, au-delà d’un nom abracadabrantesque, c’est une interface de confiance, le lien le plus direct entre les producteurs et les consommateurs d’une même région. La création même de cette entreprise repose sur le concept de « circuit court ». Comment ça marche ? Un habitant décide de créer une ruche (point relais) dans sa ville : il en devient le responsable. Il doit alors trouver des producteurs, artisans et agriculteurs afin de permettre à sa ruche de proposer un large choix de produits.  Chaque utilisateur – nommé abeille par le service – réalise sa commande via internet, choisit ses produits en fonction des disponibilités. Ce dernier ne sera débité que si son panier est complet à la fin la vente.  Rien n’est imposé, comme par exemple dans une AMAP traditionnelle où l’on ne choisit pas forcément tous les produits. Le producteur quant à lui ne se déplace que si un nombre minimum de commandes est atteint.

 

Création d’une communauté

Au-delà du concept innovant et solidaire, La Ruche Qui Dit Oui! revendique la création d'une véritable communauté autour de ses ruches. Exemple le plus marquant : après avoir récupéré leur panier, certains participants bénéficient d'un repas organisé par le responsable et les producteurs de la « ruche ». Cela renforce l’idée qu’une ruche n’est pas juste un point relais où l’on récupère un panier mais un véritable lieu de vie où des voisins font connaissance. Tout est pensé pour que l’expérience soit unique au moment de récupérer ses victuailles. Il n’y a pas d’échanges monétaires au sein de la ruche dans le but de focaliser l’utilisateur sur l’essentiel : la communauté.

 

Certains responsables de ruche innovent pour animer la communauté et proposent à des producteurs d’organiser des journées portes ouvertes dans leur exploitation agricole. Les abeilles peuvent donc aller rencontrer leurs producteurs et même participer aux tâches quotidiennes.

 

Activité créatrice de valeurs ajoutées

« Les gens ont la possibilité de faire [grâce à LaRucheQuiDitOui] […] On se fait souvent prendre la main par les services. […] Ce service fait la promotion du faire soi-même » Guilhem Chéron, Co-fondateur, designer industriel de formation, interview du 24/11/2013.

L’entreprise offre l’opportunité à ses utilisateurs de créer leur propre ruche sous certaines conditions. Les responsables de ruche qui s’occupent, entre autres, de mettre en relation les producteurs et les consommateurs, animent une communauté d’abeilles et sont rémunérés pour ça. Ils perçoivent 8,35% de la recette d’une vente. La RucheQuiDitOui! est une entreprise collaborative. Quesako ? C’est une entreprise qui met l’utilisateur au centre de sa stratégie. Ce qui se matérialise par des ruches et leurs abeilles, des groupes Facebook et Instagram. La force de cette communauté est d’être pro-active, les membres proposent, échangent et améliorent les outils ou services qu’ils ont à leur disposition. La ruche Mama (la maison mère) travaille en étroite collaboration avec ses membres (abeilles, responsables et producteurs) permettant ainsi d’améliorer ses outils directement avec l’utilisateur et donc offrir de meilleures prestations.



L’activité permet ainsi aux producteurs d’utiliser des canaux directs pour limiter les intermédiaires… mais pas seulement. Selon Convertisseur Terre de Liens (Normandie), Il serait possible de créer en France près de 600 000 emplois dans l’agriculture via les circuits courts.

Elle offre aussi la possibilité de gérer une petite entreprise à l’échelle d’un quartier. Le responsable gère la ruche comme si c’était sa propre entreprise : communication, logistique, etc… Les responsables de ruche contribuent également à améliorer la RQDO! dans beaucoup de domaines, notamment celui de la communication : au lancement d’une ruche, chaque responsable reçoit un kit (composé de tabliers, flyers et banderoles). Il  est élaboré par la ruche Mama et personnalisable par tous les responsables de ruche. Ils ont accès à un groupe privé Facebook où chacun échange ses impressions. Ils peuvent également contacter directement les employés de la RQDO! et demander des informations ou faire des suggestions. La communauté contribue ainsi largement au développement de l’entreprise, elle lui permet de faire des économies : les responsables de ruche travaillent pour l’entreprise indirectement. Dans une activité de services, où l’utilisateur est au coeur de la stratégie, l’entreprise peut se concentrer sur l’aspect technique et ainsi satisfaire au mieux les attentes de chacun.

 

L’expérience utilisateur 

La page d’ accueil avant : chez La RucheQuiDitOui! La couleur brune a été volontairement choisie en référence au monde de la terre.

L’interface a récemment changé. On constate que le formulaire d’inscription, qui occupait une place centrale auparavant, a disparu de la page d’accueil. Il se trouve un peu plus bas : cela permet à l’utilisateur d’ “apprendre à connaître”, étape par étape, la RQDO! L'intention est intéressante, même si l'on peut regretter la possibilité de s'inscrire immédiatement.


Le design intervient à de nombreuses étapes, même insoupçonnées. L’expérience commence sur le site internet. Le site est conçu de telle sorte que les actions soient intuitives. Les designers du site se sont mis à la place de l’usager en imaginant des parcours d’utilisateurs. Le site est un scroll website. Cela rend la navigation intuitive à la souris : plus on descend, plus on en apprend sur le fonctionnement de l’entreprise. On arrive dans un premier temps sur une carte de France, ainsi on sait si une ruche est  à proximité de son domicile ou non. On se met à la place de l’utilisateur. Tout est fait pour qu’on s’imagine la situation, le site représente les scènes sous forme de dessins pour qu’il puisse se projeter. En complément à ces dessins, une fois arrivé au moment crucial de l’inscription, on peut lire au-dessus “soutenez l’agriculture locale”.

 

Exemple d’utilisation du kit : les flyers (à droite) ont été utilisés pour créer des banderoles

 

Les supports de communication comme les flyers et banderoles sont pensés avec les membres de la communauté afin de véhiculer au mieux les informations recherchées correspondant à leurs besoins. Les responsables de ruche qui sont « sur le terrain », au contact des abeilles et des producteurs connaissent leurs besoins. Ainsi, ils ont juste à faire une requête à un employé de la ruche Mama via un groupe Facebook pour recevoir de nouveaux flyers par exemple.

Une ruche en pleine activité

 

Concernant les moments d’échange, quand les abeilles vont récupérer leur panier, l’entreprise a limité les contraintes qui pouvaient exister. L’utilisateur achète des produits sans engagement particulier de sa part dans le temps et tout ça via une plate-forme interactive. Il est libre de choisir si il souhaite participer à une vente ou non, contrairement à une AMAP où l’on paye pour plusieurs ventes. Les producteurs peuvent décider de prendre part ou non à une transaction en fonction de leurs récoltes et des stocks disponibles. En terme d’expérience utilisateur, l’usager ne se voit imposé aucune contrainte, tout se fait selon sa volonté… sauf la pluie et le beau temps.

 

Interface "marchande" à proprement parler

 

Le design de l’expérience utilisateur est peut-être moins perceptible au niveau du produit mais pourtant bien présent. L’expérience se matérialise par l’origine et la qualité des produits proposés. La ruche propose des produits d’agriculteurs de la région et qui, pour une très grande majorité, cultivent en bio. L’expérience continue enfin même une fois chez soi. On rentre à la maison, on cuisine les produits. L’objectif est de responsabiliser l’utilisateur en lui montrant qu’en agissant ainsi, il fait vivre des producteurs.